Rencontres avec Jésus – La veuve de Naïm et son fils

Illustration librement inspirée d’une œuvre du peintre Jan Frans Verhas

Une nouvelle invitation à rencontrer Jésus, par l’entremise de la veuve de Naïm et de son fils!

GRANDE VISITE POUR UNE VEUVE ET SON FILS : Luc 7, 11-17

Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc – Chapitre 7

11 Par la suite, Jésus se rendit dans une ville appelée Naïm. Ses disciples faisaient route avec lui, ainsi qu’une grande foule.

12 Il arriva près de la porte de la ville au moment où l’on emportait un mort pour l’enterrer ; c’était un fils unique, et sa mère était veuve. Une foule importante de la ville accompagnait cette femme.

13 Voyant celle-ci, le Seigneur fut saisi de compassion pour elle et lui dit : « Ne pleure pas. »

14 Il s’approcha et toucha le cercueil ; les porteurs s’arrêtèrent, et Jésus dit : « Jeune homme, je te l’ordonne, lève-toi. »

15 Alors le mort se redressa et se mit à parler. Et Jésus le rendit à sa mère.

16 La crainte s’empara de tous, et ils rendaient gloire à Dieu en disant : « Un grand prophète s’est levé parmi nous, et Dieu a visité son peuple. »

17 Et cette parole sur Jésus se répandit dans la Judée entière et dans toute la région.

Extrait de la Traduction Liturgique de la Bible – © AELF, Paris


Commentaire de l’Évangile

Par Daniel Cadrin, o.p.

Nous sommes dans le temps pascal. Après une chronique avec un père et sa fille, à qui Jésus rend vie, nous avons maintenant une mère et son fils, que Jésus relève. Les deux jeunes, qui étaient morts, sont réveillés par Jésus le Seigneur. C’est vraiment le temps de la résurrection.

Nous nous retrouvons à la porte d’une ville en Galilée, au sud de Nazareth, Naïn, qui en hébreu signifie agréable, beau. À l’époque, la porte d’une petite ville est importante: les arrivées et départs, les échanges et la circulation, les rencontres, tout passe par cet endroit. Qui est là? Luc nous montre Jésus et ses disciples, une veuve et son fils mort, des porteurs et une grande foule qui réagit. Dans ce récit, nous devenons témoins d’un événement surprenant et touchant: la résurrection d’un jeune homme. Et à travers ce récit, Luc nous montre plusieurs traits de Jésus prophète et Seigneur.

Comme il arrive fréquemment dans les évangiles, tout commence non par l’action de Jésus mais par le regard de Jésus. Il voit cette femme portant son fils en terre. Son regard est attentif, sachant saisir ce qui se passe mais aussi ce qui habite les coeurs. Devant cette triste scène, il est pris de pitié, littéralement ému aux entrailles. Dans la Bible, c’est de là que vient la miséricorde. Cette scène bouleverse Jésus, suscite en lui une profonde compassion. Cette femme est veuve et en plus elle a perdu son fils unique: à l’époque, cela signifie solitude, pauvreté, insécurité, en plus de cette perte douloureuse.

Le récit aurait pu s’arrêter là, chacun poursuivant sa route. Mais Jésus, après son regard et sa compassion, passe à l’action, comme le bon Samaritain de la parabole (Lc 10, 33-34); ce sont d’ailleurs deux récits propres à Luc. Que fait Jésus? Il intervient de trois manières. D’abord par sa parole de confiance adressée à la mère (Ne pleure pas), puis par son ordre de réveil adressé au jeune homme (Lève-toi), puis par la remise du fils à sa mère.

Et ce don d’une vie nouvelle, cette résurrection, a des effets humains significatifs: le jeune homme se met à parler, il est vraiment un vivant; la relation entre la mère et le fils est recréée; et les gens rendent gloire à Dieu. La source de cette transformation, c’est la parole de Jésus. Elle ne tombe pas du ciel mais s’enracine dans le regard et la compassion. Elle est agissante de plusieurs manières. Cette parole porte des fruits chez toutes les personnes qui la reçoivent ou l’entendent.

Ce récit évoque la figure du prophète Élie ressuscitant le fils unique de la veuve de Sarepta (1 Rois 17). Jésus se montre ainsi un grand prophète, comme la foule le proclame. Mais Jésus est aussi plus qu’un prophète, il est le Seigneur. En lui, la puissance du Dieu créateur est présente. Il est la Parole qui crée, qui donne vie. En lui, c’est Dieu qui rend visite à son peuple, comme la foule aussi le proclame (v.16). Cette visite, en Luc, est liée à une libération et à la miséricorde de Dieu, comme on le voit au début de son Évangile dans la bénédiction de Zacharie (Lc 1,68), le père de Jean-Baptiste, qui fut rempli de l’Esprit Saint et prophétisa en ces termes : « Béni soit le Seigneur, le Dieu d’Israël, parce qu’il a visité son peuple, accompli sa libération« 

Quand Dieu nous rend visite (et c’est de la grande visite!), qu’arrive-t-il, aujourd’hui encore? Quels en sont les signes? Des yeux s’ouvrent et voient ce qui les entoure. Devant des détresses, des entrailles sont remuées, des coeurs sont touchés. Des paroles qui donnent confiance sont offertes aux endeuillés. Des paroles qui redonnent vie sont lancées aux endormis en tant de morts. Des liens sont renoués, des retrouvailles adviennent. Des gens prennent conscience qu’une bonté profonde les visite et ils rendent grâce. Et une Bonne nouvelle se répand.

Ainsi, cet évangile de Luc nous invite à nous poser des questions: Quels signes de cette grande visite puis-je reconnaître dans mon milieu, dans ma propre vie, dans celle de mes groupes? Et alors, je suis invité-e à rendre grâce pour ce temps de bonté. Mais aussi, quels signes de cette visite puis-je moi-même offrir? Comment pouvons-nous prendre part activement à cette visite? Entre autres, par notre regard qui sait voir, par notre compassion face aux détresses, et par notre parole qui est source de vie et de confiance …

Images

Comme Jaïre et sa fille et la femme hémorroïsse de la chronique précédente, la veuve et son fils sont présents dès les débuts de l’art chrétien, et tout au long des siècles. Ce récit est bref mais il est bien rempli et suggestif au plan visuel. Des lieux précis sont indiqués : la porte de la ville de Naïn. Plusieurs acteurs sont présents : Jésus et ses disciples, la veuve et son fils, les porteurs, la foule. Une action dramatique advient : Jésus redonne vie à un jeune homme mort, fils unique, devant sa mère, une veuve en pleurs. C’est très vivant et saisissant.

Les œuvres peuvent montrer tous ces éléments, en retenir quelques uns ou accentuer l’un ou l’autre. La porte de la ville peut être présentée avec détails ou seulement évoquée. La foule peut être plus ou moins nombreuse. Le cortège funéraire peut être bien développé et le climat de deuil souligné. Jésus est en interaction avec le fils et parfois avec la mère. Dans le texte, Jésus appelle le fils : jeune homme. Mais dans les images, son âge peut varier : il peut avoir l’air d’un garçon, d’un adolescent, ou d’un jeune adulte.

Voici quelques œuvres, d’époques et de styles différents, nous montrant cette rencontre.

  1. Sarcophage de marbre, c.300-330, Musée du Vatican. Sur ces sarcophages de défunts chrétiens, des scènes bibliques étaient sculptées pour les accompagner dans leur passage. Avec les fresques, elles forment les plus anciennes œuvres de l’art chrétien. Ici, comme dans les autres, Jésus est un jeune homme; le fils de la veuve est très petit! Comme pour la fille de Jaïre, Jésus redonne vie au fils en le touchant avec un bâton, qui est signe de son autorité. Il regarde la veuve devant lui. Des disciples l’accompagnent.
  1. Relief de bronze, c.1020, Colonne Bernward, Cathédrale d’Hildesheim, Allemagne. Cette colonne a été commandée par Bernward, évêque d’Hildesheim, pour l’église St-Michel; elle était située derrière l’autel. Au 19ème siècle, elle fut déménagée dans la cathédrale. De style ottonien et s’inspirant de la colonne de Trajan à Rome, avec sa spirale, elle comprend vingt-huit scènes de la vie de Jésus, de son baptême à l’entrée à Jérusalem. Jésus, nimbé et majestueux, relève le jeune homme nu. Un disciple est derrière Jésus; la mère et la foule, derrière le fils. Ils s’agrippent un peu à la colonne pour ne pas tomber de haut!
  1. Miniature, c.1020-1030, Codex Aureus Epternacensis, Musée National Germanique, Nuremberg, Allemagne.  Ce manuscrit enluminé est écrit avec des lettres d’or, d’où son nom. Il a été fait, à la même période que l’œuvre précédente, par le scriptorium de l’Abbaye d’Echternach, ville aujourd’hui au Luxembourg. Ici, tout le monde est là : les disciples, la foule nombreuse, les porteurs. Jésus, jeune et nimbé, tient en main gauche un rouleau de la Parole et tend la main droite pour appeler le fils à se lever; celui-ci est bien éveillé et redressé. La mère, devant Jésus, lève les bras et rend grâce. La ville de Naïn est évoquée par une architecture à droite.
  1. Mosaïque, 1179-1182, Cathédrale de l’Assomption, Monreale (Sicile), Italie. Cette église comprend un grand ensemble de mosaïques de style byzantin, dont un cycle sur la vie du Christ qui est solennel, comme la figure du Pantocrator des icônes. Ici, plusieurs éléments sont semblables au relèvement de la fille de Jaïre. Jésus appelle le fils à se réveiller et tient sa main. Trois disciples sont derrière lui. Le jeune homme est bien redressé, les yeux ouverts. Plusieurs figures sont proches de lui, dont sa mère, d’autres femmes, des porteurs, des témoins. Toutefois, sa civière ressemble plus à un lit, avec de beaux tissus ! La ville est à gauche, avec porte et édifices.
  1. Maître de la Passion de Darmstädter, c.1450-1460, Alte Pinakothek, Munich, Allemagne. Ce peintre allemand, dont on ignore le nom, a été influencé par le gothique international et le réalisme flamand, avec un travail personnel sur la lumière. Ce panneau faisait partie d’un retable. Jésus, bien nimbé, touche le jeune homme, qui a l’air d’un petit garçon! Ses disciples, aux yeux ouverts, sont derrière lui. La jeune mère, en blanc, avec une compagne, se trouve devant la porte de la ville, plutôt étroite, où deux figures de la foule peuvent être vues. Les porteurs sont présentés avec vivacité, à l’avant-scène.
  1. Lucas Cranach le Jeune, retable, c.1569-1573, Église Sainte-Marie (Stadtkirche), Wittenberg, Allemagne. Ce peintre et graveur est le fils de Lucas Cranach l’Ancien, ami de Martin Luther et figure majeure de l’iconographie de la Réforme protestante. Il a pris la succession de l’atelier de son père. Ici, nous avons un long cortège funéraire de gens habillés en blanc et noir. Ils sortent de la porte de la ville et descendent vers le bas. La ville est montrée avec détails, dans ses murs, ses édifices et ses tours, avec un paysage à l’arrière, le tout reflétant le 16e siècle. Au bas de la descente, se trouve Jésus, en brun, entre la veuve et son fils debout; il tient la main de chacun.
  1. Jean-Baptiste Wicar, 1816, Palais des Beaux-Arts, Lille, France. Originaire de Lille et formé à Paris, chez le néo-classique Jacques-Louis David, puis à Rome, ce peintre a vécu surtout en Italie. Il a fait des portraits et des scènes historiques, qui ont eu beaucoup de succès à son époque. Cette oeuvre est de très grand format : 5.7 x 9 mètres! Il y a de la place pour toute le monde, et pour d’autres. La porte, les murs et les tours de la ville sont bien visibles. Le jeune homme sur sa civière, au centre du tableau, revient à la vie et soulève son suaire. Jésus à droite l’appelle à se lever; des disciples l’accompagnent dont Jean et Pierre. Derrière le fils, se trouve sa mère et plusieurs femmes. Une foule nombreuse réagit à l’événement. À l’extrême-droite du tableau, un autoportrait du peintre; et à l’extrême-gauche, un portrait de son maitre David. Plusieurs figures, postures et éléments du tableau font référence à des œuvres d’autres peintres, portant sur des scènes antiques; comme une synthèse, ou des clins d’œil pour les connaisseurs.
  1. Wilhelm Kotarbinski,1879, Musée National, Varsovie, Pologne. Ce peintre polonais, formé à Varsovie et à Rome, s’est installé à Kyiv, en Ukraine, alors dans l’Empire russe. Il s’inscrit dans le courant symboliste et moderne. Il a fait plusieurs œuvres historiques et bibliques. La scène se passe à l’extérieur de la ville, avec des édifices en blanc à l’arrière. La foule est peu nombreuse. La civière est déposée sur le sol. La mère est aux pieds de Jésus. Celui-ci, en blanc, à la main droite levée, est solennel. À gauche, un vieillard avec canne, en blanc lui aussi, est impressionnant. L’œuvre exprime à la fois une intensité dramatique et un certain calme.
  1. James Tissot, c.1886-1894, Brooklyn Museum, États-Unis. Comme souvent, ce peintre français, qui a vécu en Terre Sainte, sait intégrer tous les éléments du récit, en les situant dans un contexte historique et en mouvement. Au centre, Jésus et le jeune homme, tous deux en blanc. Jésus lève les mains pour l’appeler à se réveiller; celui-ci se redresse dans son cercueil. Sa mère, à droite de Jésus, tend les mains vers son fils. À l’avant du cortège funéraire, on voit les musiciens, devant les porteurs. Ici, nous avons toute une foule, avec de vives réactions, serrée à la porte de la ville.
  1. Harold Copping, 1927, Women of the Bible, Religious Tract Society, London, Angleterre. Comme Tissot, ce peintre de Londres a illustré la Bible avec un souci de prendre en compte le contexte et de rendre vivantes les scènes. Ici, tous les personnages sont proches. La scène se passe près d’un mur de la ville. Jésus est tourné vers la veuve, qui tend les bras vers son fils, qui s’est redressé sur sa civière. Disciples et foule entourent Jésus, la mère et le jeune homme. Des regards sont échangés.
  1. Sadao Watanabé, estampe, 1973, Collection privée, Japon. Cet artiste chrétien intègre des techniques d’un art populaire japonais, le mingei. L’œuvre comprend deux parties. En haut, Jésus nimbé est au centre; à droite, on voit trois disciples; à gauche, la veuve en pleur, penchée, qui est accompagnée de deux figures dont l’une la soutient. En bas, Jésus est à gauche et la veuve à droite; au centre, se trouve le jeune homme, qui s’éveille à l’appel de Jésus.
  1. Bernadette Lopez, 21e siècle, site évangile-et-peinture.org, Suisse. Dans ses œuvres aux couleurs vives, qui couvrent tout le cycle liturgique, Berna sait mettre en lumière des éléments des récits évangéliques. Ici, l’accent est mis sur les retrouvailles, émouvantes, entre la mère et le fils. Jésus, en retrait, tête penchée, se montre discret. La foule est nombreuse, témoin de cette scène touchante. J’en fais partie et cela vient me chercher quelque part …

Daniel Cadrin, o.p.


​Dessin à tracer et à colorier

Ci-dessous un dessin simplifié à tracer et à colorier, librement inspiré d’une œuvre du peintre Jan Frans Verhas

Cliquer sur l’image pour l’agrandir et la sauvegarder!


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