Rencontres avec Jésus – Thomas

Une réinterprétation d’une fresque de Luca Signorelli sur le thème de Thomas touchant les blessures de Jésus.

Une nouvelle invitation à rencontrer Jésus, cette fois-ci au travers de Thomas que Jésus invite sur le chemin de la foi!

Thomas, le sceptique devenu croyant : Jean 20, 19-31

Extrait de l’Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean

19 Le soir venu, en ce premier jour de la semaine, alors que les portes du lieu où se trouvaient les disciples étaient verrouillées par crainte des Juifs, Jésus vint, et il était là au milieu d’eux. Il leur dit : « La paix soit avec vous ! »

20 Après cette parole, il leur montra ses mains et son côté. Les disciples furent remplis de joie en voyant le Seigneur.

21 Jésus leur dit de nouveau : « La paix soit avec vous ! De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie. »

22 Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et il leur dit : « Recevez l’Esprit Saint.

23 À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ; à qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus. »

24 Or, l’un des Douze, Thomas, appelé Didyme (c’est-à-dire Jumeau), n’était pas avec eux quand Jésus était venu.

25 Les autres disciples lui disaient : « Nous avons vu le Seigneur ! » Mais il leur déclara : « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous, si je ne mets pas la main dans son côté, non, je ne croirai pas ! »

26 Huit jours plus tard, les disciples se trouvaient de nouveau dans la maison, et Thomas était avec eux. Jésus vient, alors que les portes étaient verrouillées, et il était là au milieu d’eux. Il dit : « La paix soit avec vous ! »

27 Puis il dit à Thomas : « Avance ton doigt ici, et vois mes mains ; avance ta main, et mets-la dans mon côté : cesse d’être incrédule, sois croyant. »

28 Alors Thomas lui dit : « Mon Seigneur et mon Dieu ! »
29 Jésus lui dit : « Parce que tu m’as vu, tu crois. Heureux ceux qui croient sans avoir vu. »

30 Il y a encore beaucoup d’autres signes que Jésus a faits en présence des disciples et qui ne sont pas écrits dans ce livre.

31 Mais ceux-là ont été écrits pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu’en croyant, vous ayez la vie en son nom.

Commentaire de l’Évangile

Par Daniel Cadrin, o.p.

La figure de Thomas fait réagir. Ce disciple, qui a besoin de voir et de toucher pour croire, suscite la sympathie ou la réserve. Certains se reconnaissent en lui, comme s’il anticipait une réaction moderne face à l’affirmation croyante. Notre culture valorise comme sources d’autorité l’expérience personnelle et le primat du concret, du vérifiable. N’est réel que ce que j’ai perçu et ce qui est observable. En cela, Thomas nous est contemporain. Les affirmations des autres disciples ne lui suffisent pas; elles parlent d’une réalité qui n’est pas visible et tangible et qu’il n’a pas expérimentée. Son doute nous semble raisonnable et même exemplaire.

D’autres voient plutôt Thomas comme un contre-modèle, moderne aussi mais disant bien les limites de notre culture. Il est la figure de l’homme borné et enfermé dans son petit monde, inconscient de la grandeur du réel, qui déborde nos perceptions. Voilà bien le mâle occidental, obsédé par la raison, incapable d’écouter ce que les autres disent et ne prenant en compte que les exigences de l’efficacité pragmatique. Ou d’un autre point de vue, Thomas est le sceptique fermé à l’expérience spirituelle et religieuse, l’incrédule de service qui fait mieux ressortir, en contraste, la valeur de notre piété.

Pauvre Thomas! Il a le dos large pour porter nos revendications d’identification et nos distances critiques. Mais que sait-on de lui? Qu’est-ce que l’Évangile de Jean nous en dit, pour compléter son portrait? C’est lui qui avait dit à Jésus, annonçant son départ (14,5): nous ne savons pas où tu vas, comment saurions-nous le chemin? Réaction de bon sens mais un peu étroite! Mais Thomas est capable d’élan et de don. Dans le récit de Lazare, il dit (11,16): allons mourir avec lui, mais là encore il n’a pas saisi ce que disait Jésus! Un Thomas bien humain, ni tout-à-fait rigoureux ou fermé, mais qui a du chemin à faire. Mais nos réactions face à Thomas expriment des saisies qui ne sont pas sans fondement dans le texte de Jean, si on le considère dans son ensemble.

Ce récit s’inscrit dans les manifestations de Jésus le vivant au jour de Pâques. Tout est concentré en un jour, de l’apparition à Marie de Magdala jusqu’à la Pentecôte où le Ressuscité envoie son Esprit sur les disciples rassemblés en un lieu clos. Et ce jour, le premier de la semaine, il est toujours actuel. La présence du Ressuscité advient quand les disciples sont rassemblés; elle est expérience de paix, refrain repris trois fois dans ce passage. Pour les disciples et Thomas, sont mis en évidence les mains et le côté de Jésus, qui renvoient à sa mort en croix. Et qu’est-ce que croire? L’entrée dans le croire ne relève pas du mode de l’évidence. Signes, visage, paroles, expériences de paix, et la mémoire de la croix, sont offerts à notre regard, pour qu’il s’ouvre et interpréte. Comme aujourd’hui. Mais ce croire est aussi éminemment une expérience personnelle. En Jean, il n’est jamais question de la foi. Ce n’est pas un thème général ou un objet à prendre et garder. Ce dont il est question, c’est d’un verbe, croire, qui demande toujours un sujet : les disciples, Thomas, vous, et ceux à venir. Ces derniers sont d’ailleurs qualifiés d’heureux; cette béatitude nous est adressée.

Le verbe croire ne peut exister en lui-même. Il devient actif et agissant quand un individu, un groupe, est placé devant lui et lui fait donner sa mesure, celle d’une rencontre et d’une vie en abondance : ils commencèrent à croire, nous croyons, elle croyait, vous croirez. Cette approche de Jean rejoint une requête de notre temps. Elle souligne la dimension personnelle et expérientielle de l’itinéraire croyant. À Thomas, le Seigneur dit : non pas aie la foi, mais sois croyant. Et Thomas, par sa réponse, indique qu’il entre dans cette expérience, personnellement : mon Seigneur et mon Dieu. Et il n’a plus besoin de toucher à Jésus; ses yeux de croyant se sont ouverts. C’est la parole de Jésus et sa présence de paix qui l’amènent à croire.

Par ailleurs, une limite de Thomas demeure, qui est nôtre aussi. La difficulté à faire confiance en la parole d’autrui, quand il n’y a pas de réalité visible, évidente, qui nous contraigne presque à croire. La parole d’autrui est fragile, située, elle n’a pas l’éclat du miracle, mais elle est aussi signe offert pour que nous croyions et ayions la vie. Paroles de Marie de Magdala aux disciples, la première à annoncer le Ressuscité, puis paroles des disciples à Thomas : paroles qui communiquent un esprit transformant et une découverte personnelle, parole des témoins qui ont transmis jusqu’à nous la nouvelle d’une rencontre. Quels signes, quelle paix, et quelle autre parole me sont offerts, à voir et entendre?

Thomas lui-même, par la suite, est parti sur les routes, très loin dit la tradition, jusqu’aux Indes, pour communiquer cette paix et témoigner d’une croix glorieuse. Et encore aujourd’hui, il est là quelque part, cherchant à répondre à des gens qui lui demandent des preuves. Les seuls signes qu’il peut offrir, c’est lui-même et la communauté des siens, une paix qui se transmet, et la croix donneuse de vie. Et un appel à ouvrir le regard et à changer d’horizon, pour être heureux.

Images de Thomas

La figure de Thomas est présente dans l’iconographie dès le Moyen Âge, Elle demeure présente de façon stable, sans être majeure. Certaines œuvres montrent l’assemblée des disciples avec Thomas et ses réactions; les disciples sont parfois bien alignés pour entrer tous dans le cadre. D’autres montrent seulement Thomas et le Christ ressuscité, ou avec quelques disciples.

Le texte de Jean ne mentionne pas que Thomas touche les mains et le côté de Jésus, mais plusieurs œuvres le montrent. Visuellement, c’est plus intéressant de procéder ainsi et cela correspond à l’invitation de Jésus à Thomas. Par ailleurs, c’est parfois à la limite du bon goût. Quant à Jésus ressuscité, il est présenté dans sa gloire, lumineux, avec les marques de la croix.

Le lieu de la rencontre est suggéré, surtout dans les œuvres incluant les autres disciples. Il est peu évoqué dans les œuvres n’incluant que Thomas et le Christ.

Voici quelques œuvres anciennes et récentes, dont plusieurs d’Europe de l’Est :

  1. Relief, c.1150, cloître, Abbaye St-Dominique de Silos, Espagne. Ce monastère bénédictin, situé en Castille, a un cloître roman réputé. Dans ce relief, tous les apôtres sont présents, avec des attributs en mains. Le Christ lève le bras droit pour que Thomas touche son côté, C’est une œuvre élégante et touchante.
  1. Tabernacle de Cherves, c.1220-1230, intérieur de la porte droite, Metropolitan Museum of Art, New York, États-Unis. Cette œuvre remarquable, en cuivre et émail, a été fabriquée à Limoges. Elle appartenait au prieuré de Gandory, dans la région de Cognac, de l’Ordre de Grandmont. Dans une ovale, on voit Thomas touchant le côté du Christ ressuscité, couronné.
  1. Franciszek Smuglewicz, 1800, Musée National, Varsovie, Pologne. Ce peintre polonais-lituanien, de Varsovie, marqué par le classicisme et le baroque, a peint des scènes historiques. À partir de 1797, il demeure à Vilnius; la Lituanie vient d’entrer dans l’Empire russe. Ici, les apôtres ont l’air ébahi et des visages travaillés par la vie. Le Christ, au centre, est jeune et rayonnant de lumière. Thomas, qui n’est plus un jeune homme, touche son côté avec précaution. Le Christ le prend par l’épaule.
  1. Carl Heinrich Bloch, 1881, Museum of National History, Frederiksborg, Danemark. Ce peintre de Copenhague, marqué par Rembrandt, a fait plusieurs scènes de la vie du Christ, qui ont été et demeurent populaires. Ici, trois apôtres sont près de Jésus. Thomas est agenouillé, bouleversé, il ne touche pas Jésus. Celui-ci, vêtu de blanc, est lumineux.
  1. Eduard von Gebhardt, c.1900, collection privée, Allemagne. Originaire d’Estonie, alors dans l’Empire russe, ce peintre a été formé à St-Pétersbourg, puis s’est installé à Düsseldorf en Allemagne. Il a peint des scènes bibliques, avec un souci de réalisme et d’expression des sentiments. Les apôtres, avec des visages d’hommes du peuple, sont surpris et tournés vers Jésus. Thomas, l’air bouleversé, se détourne de Jésus : il devient croyant. Jésus, vêtu de noir, ce qui est rare, tient son bras. Le lieu de la rencontre est bien montré, une solide maison.
  1. Michel Ciry, c.1970-1990, Musée Michel Ciry, Varangeville-sur-Mer, Normandie, France. Ce peintre, compositeur et écrivain, exprime sa foi chrétienne à travers son art. Les personnes y sont souvent seules et en recherche. Ici, Thomas, avec son air inquiet et attentif, touche les mains de Jésus, qu’on ne voit pas.
  1. Jacek Andrzej Rossakiewicz, 1990, Pologne. Pour ce peintre polonais, mort en 2016, qui est aussi philosophe et architecte, l’art est lié à la quête spirituelle. Ses œuvres sont marquées par la Bible. Celle-ci fait partie d’une série de quinze peintures sur la passion selon Jean. Thomas est agenouillé près du Christ. Les deux ont les yeux fermés. Quatre autres apôtres sont présents, yeux ouverts. Le tout est méditatif et inspirant.
  1. Andrei Mironov, 2010, site artmiro.ru. Ce peintre russe de Riazan, au sud de Moscou, a été marqué par son expérience militaire. Outre des portraits, son oeuvre est religieuse, avec des peintures et icônes. Elle s’inspire de la tradition mais y intègre une certaine étrangeté, qui dépayse. Ici, les apôtres sont tous en profonde réflexion. Le Christ, à l’air dubitatif, s’éloigne nettement des figures habituelles du ressuscité. Et Thomas, le seul dont on ne voit pas le visage, le regarde.
  1. Ulyana Tomkevych, 21e siècle, site iconart-gallery.com. Cette artiste de Lviv en Ukraine s’inscrit dans la tradition de l’art ukrainien des icônes, mais avec le souci d’une attention à son expérience personnelle et sa recherche de Dieu. Ici, tous les apôtres sont là, chacun avec son expression, comme dans l’image no 1. Thomas, qui a l’air plus jeune, touche le côté du Christ, qui lève le bras droit et est nimbé de vert.
  1. Julia Stankova, 2014, site jukiastankova.com, Bulgarie. Cette artiste de Sophia en Bulgarie, qui est aussi ingénieure et formée en théologie, peint des icônes et des œuvres religieuses. Elle commente ainsi celle-ci : « Saint Thomas est le seul disciple qui a besoin de toucher la blessure de Jésus, comme un sculpteur qui sculpte sa foi dans la matière. En sculptant sa foi, il crée en fait son propre visage spirituel. Il existe ainsi dans deux mondes à la fois, séparés par l’arbre de la connaissance. Par sa présence dans le Nouveau Testament, saint Thomas jette les bases de l’idée que l’art peut être un chemin spirituel. » Oui, l’art peut l’être …

Daniel Cadrin, o.p.


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