Rencontres avec Jésus – Marie debout à la croix

Adaptation numérique d’une œuvre du « Maître de la Vie de Marie »

Une nouvelle invitation à rencontrer Jésus, au travers de la présence de Marie au pied de la croix.

MARIE DEBOUT À LA CROIX : Jean 19, 25-34

Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean – Chapitre 19

25 Or, près de la croix de Jésus se tenaient sa mère et la sœur de sa mère, Marie, femme de Cléophas, et Marie Madeleine.

26 Jésus, voyant sa mère, et près d’elle le disciple qu’il aimait, dit à sa mère : « Femme, voici ton fils. »

27 Puis il dit au disciple : « Voici ta mère. » Et à partir de cette heure-là, le disciple la prit chez lui.

28 Après cela, sachant que tout, désormais, était achevé pour que l’Écriture s’accomplisse jusqu’au bout, Jésus dit : « J’ai soif. »

29 Il y avait là un récipient plein d’une boisson vinaigrée. On fixa donc une éponge remplie de ce vinaigre à une branche d’hysope, et on l’approcha de sa bouche.

30 Quand il eut pris le vinaigre, Jésus dit : « Tout est accompli. » Puis, inclinant la tête, il remit l’esprit.

31 Comme c’était le jour de la Préparation (c’est-à-dire le vendredi), il ne fallait pas laisser les corps en croix durant le sabbat, d’autant plus que ce sabbat était le grand jour de la Pâque. Aussi les Juifs demandèrent à Pilate qu’on enlève les corps après leur avoir brisé les jambes.

32 Les soldats allèrent donc briser les jambes du premier, puis de l’autre homme crucifié avec Jésus.

33 Quand ils arrivèrent à Jésus, voyant qu’il était déjà mort, ils ne lui brisèrent pas les jambes,

34 mais un des soldats avec sa lance lui perça le côté ; et aussitôt, il en sortit du sang et de l’eau.

Extrait de la Traduction Liturgique de la Bible – © AELF, Paris


Commentaire de l’Évangile

Par Daniel Cadrin, o.p.

Le commentaire qui suit a paru dans la chronique Marie des Écritures de la revue Notre-Dame du Cap, avril 2022, p.14, sous le titre : Notre-Dame de la Présence.

En ce temps de la Passion et de la Pâque du Seigneur, tenons-nous avec Marie, au pied de la croix. Dans l’Évangile de Jean, elle était présente au premier signe accompli par Jésus, à Cana. Elle est présente aussi à la fin, alors que Jésus va remettre l’esprit. Avec elle se trouvent trois autres femmes ainsi que le disciple bien-aimé de Jésus. Comme à Cana, Marie n’a pas de nom : c’est la mère de Jésus. Le disciple non plus n’est pas nommé. Les deux ne sont pas seulement des figures historiques mais évoquent la communauté chrétienne. Que fait Marie et que lui arrive-t-il?

Marie debout et solidaire

D’abord, Marie est là, debout près de la croix. Alors que la plupart des apôtres se sont enfuis et que leur chef Pierre a renié, Marie est là, fidèle, solidaire jusqu’au bout. Devant la souffrance et le rejet, elle n’abandonne pas Jésus et elle se tient avec dignité. Comme une Mère Courage. Devant les crises qui nous adviennent, elle nous invite ainsi à ne pas quitter la barque. Et elle nous apprend à nous montrer solidaires de nos frères et sœurs qui prennent des risques au nom de l’Évangile.

Marie mère de l’Église

Jésus confie le disciple à la mère et la mère au disciple. Au moment de partir, il se soucie encore des personnes qui lui sont proches. Il les voit, son regard demeure attentif, et il en prend soin jusqu’au bout. Mais le sens de cette remise mutuelle va plus loin. La mère et le disciple ont en commun une compréhension plus profonde de la personne et du mystère de Jésus. Le disciple bien-aimé, c’est lui qui, tout au long de l’évangile, saisit le sens des évènements. Il est la figure du disciple que chacun de nous est appelé à devenir.

Marie ici n’est plus seulement la mère de Jésus mais devient la mère des disciples. Une communauté nouvelle est en train de naître au pied de la croix. Pour poursuivre l’aventure spirituelle et risquée inaugurée par Jésus, nous avons besoin les uns des autres. Pour être accueillie, approfondie et communiquée, la Bonne Nouvelle requiert des liens communautaires et ecclésiaux.

En me tenant au pied de la croix, avec Marie et le disciple, je peux me recueillir et me demander : Qu’est-ce qui m’inspire particulièrement chez la mère ou chez le disciple? Qui m’est confié et à qui suis-je confié, pour que nous prenions soin les uns des autres?

Ô Marie, Notre-Dame de la Présence, toi qui t’es tenue debout et fidèle au pied de la croix, aide-moi à me tenir avec dignité et courage face aux épreuves. Apprends-nous à devenir plus solidaires des personnes et des groupes qui souffrent. Amen.

Images

Notre récit avec la mère de Jésus et le disciple bien-aimé, que nous appellerons Marie et Jean, est un des moments de la Crucifixion, vers la fin, faisant partie de la Passion. Il n’y a pas de scène plus représentée et importante que le Christ en croix dans l’art chrétien : de toutes les manières possibles, de la mosaïque à la miniature, en passant par le vitrail et la sculpture, et dans une large variété de styles. Mais autour même du Christ en croix, plusieurs scènes se passent et plusieurs personnages interviennent. Selon les époques et les lieux, selon les sensibilités religieuses et esthétiques, les accents n’ont pas été mis sur les mêmes éléments; et les visages du Christ sont bien différents. Les ouvrages sur ces sujets surabondent. Il y a aussi les chemins de croix, qui reprennent certaines des scènes évangéliques et en ajoutent d’autres.

Notre récit en Jean est court et contient des éléments qui lui sont propres : la présence de Marie et d’un disciple, debout près de la croix (v.25); le dialogue particulier entre Jésus et ces deux figures (v.26-27); le sang et l’eau coulant du côté de Jésus (v.34).

Les images de cette scène peuvent ne montrer que les trois figures principales, soulignant ainsi leur dialogue, ou d’autres figurants et intervenants (femmes, soldats, autres crucifiés, foule, …). Marie et Jean sont habituellement debout, plus rarement assis ou à genoux. Ils sont proches, ensemble, ou de chaque côté de la croix. Les postures de leur corps et de leurs mains varient peu. Marie de Magdala, présente à la scène, est parfois à genoux au pied de la croix.

Dans les œuvres les plus anciennes, Jésus est vivant, les yeux ouverts. À partir du 9e siècle, en Orient, il a les yeux fermés; il est mort mais plutôt comme endormi. En Occident, à partir surtout du 13e siècle, le Christ aux yeux fermés apparaît. Mais, avec le temps, il est montré comme vraiment mort, de façon plus dramatique et pathétique, ce que l’Orient n’adoptera pas. Jésus est sans couronne d’épines dans la tradition orientale.

Selon les époques et les styles, le contexte de la crucifixion (lieu, ville, paysage, objets) peut être montré avec détails ou évoqué ou simplement absent. Des éléments symboliques peuvent être soulignés : astres, anges, couleurs, crâne d’Adam, plantes, ….

Des images de cette scène ont déjà été présentées dans une chronique antérieure : Le disciple anonyme et aimé (avril 2022). On en voyait six: la mosaïque de San Clemente, une fresque de Fra Angelico, un chemin de croix d’Engelbert Mveng; des peintures de Michel Ciry, Richard Serrin et Macha Chmakoff. Elles demeurent intéressantes à voir. En voici douze autres, du 8e au 21e siècles, qui nous emmènent de Rome à l’Ukraine, passant, entre autres, par la Russie et le Japon.

  1. Fresque, c.741-752, Chapelle de Théodote, Église Santa Maria Antiqua, Rome, Italie. Cette église du 5e siècle fut la première sur le Forum romain. Voici un Christ vivant, aux yeux ouverts, tête penchée et vêtu d’un colobium, comme en d’autres crucifixions anciennes. La tunique laisse voir à gauche le coup de lance reçu. Ses bras en croix sont tout-à-fait horizontaux. Les mains de Marie sont relevées en prière, recevant la parole de Jésus. Jean porte dans sa main gauche un beau livre (son Évangile?). À droite de Jésus, se trouve le porte-lance Longinus, dont le nom est écrit; à sa gauche, le porte-roseau, sans nom. Des rochers sont à l’arrière et la lune et le soleil en haut.
  1. Mosaïque, c.1050, Monastère d’Hosias Loukas, Béotie, Grèce. Ce monastère du 10e siècle est célèbre pour son art byzantin (architecture, mosaïques, icones). Cette crucifixion est une œuvre dépouillée et simple, faite avec finesse. Elle montre un Christ aux yeux fermés et au corps courbé, sans couronne d’épines; le sang jaillir de son côté et de ses mains et pieds. Sous la croix, les paroles de Jésus à sa mère et au disciple. Marie, en peine, indique le Christ de sa main, l’offrant à notre contemplation. Jean est triste, se tenant la tête. Il n’y a pas de décor, sauf la lune et le soleil au-dessus.
  1. Miniature, c.1390, Le Pèlerinage de Jésus Christ, Ms1130, f.215v, Bibliothèque Sainte-Geneviève, Paris, France. Ce manuscrit a été écrit en français, vers 1358, par un moine cistercien, Guillaume de Digulleville, prieur de l’Abbaye de Chaalis. L’enluminure a été faite dans un atelier de Paris. Seuls les trois figures sont présentes, sans décor. Jésus en croix, aux longs bras étendus, est tourné vers Marie; ses yeux sont ouverts et son côté saigne, comme ses mains et pieds. Marie et Jean, en bleu et en rouge, sont tous deux assis, ce qui est rare; ils font le même geste des mains, désignant Jésus. Les trois sont unis, formant un triangle.
  1. École de Roublev, icône, c.1420-1450, Musée Andreï Roublev, Moscou, Russie. Saint Andreï Roublev (1370-1430), un moine, fut le maître incontesté de l’iconographie russe. Cette oeuvre d’un disciple s’inscrit dans cette grande tradition. Comme dans la 2e image, on voit un Christ paisible, aux yeux fermés et au corps courbé. Marie montre son fils et invite à le contempler. Jean est accoudé et attristé. Deux anges sont au-dessus de la croix; et au pied de celle-ci, le crâne d’Adam, premier homme. C’est une œuvre à la fois très dépouillée et élégante, centrée sur l’essentiel. Une lumière s’en dégage.
  1. Henrick Ter Brugghen, 1624-25, Metropolitan Museum of Art, New York, États-Unis. Ce peintre hollandais a séjourné en Italie et a été influencé par Le Caravage. Cette œuvre a été réalisée pour une église catholique d’Utrecht. Elle est plus dramatique et sombre. La figure du Christ, avec couronne d’épines, rappelle celle de Grunewald (retable d’Issenheim, 1515). Le sang du Christ est abondant, venant des mains et pieds et du coté. En bas, le crâne d’Adam, fréquent dans les crucifixions. Marie et Jean, debout, sont attristés et tournés vers Jésus, comme si ses paroles résonnaient encore. Leur allure est celle de simples gens du peuple. Les trois figures sont rapprochées. La lumière et les couleurs du ciel évoquent une éclipse solaire (cf. Mt 27,45 : les ténèbres).
  1. James Tissot, c.1886-1894, Brooklyn Museum, États-Unis. Voici une œuvre avec un angle original, comme il arrive souvent chez cet artiste français; il aurait été un bon cinéaste. Le point de vue est celui du Christ en croix. Le regard de Jésus est important dans les évangiles; il est même souligné jusqu’à la fin (Jn 19,26). Que voit-il? Marie et deux femmes debout, Marie de Magdala agenouillée au pied de la croix, Jean qui le regarde avec intensité; et puis les soldats, les Pharisiens et les Sadducéens bien visibles, des gens du peuple; et probablement parmi eux, discrètement, de loin, des disciples. Pendant que la mère et le disciple bien-aimé reçoivent les paroles de Jésus : voici ton fils, voici ta mère.
  1. Mikhaïl Nesterov, c.1900, Église Saint-Alexandre-Nevski, Abastumani, Géorgie. Ce peintre russe, formé à Moscou et à Saint-Pétersbourg, qui a beaucoup voyagé, a fondé le courant artistique russe du symbolisme religieux. Orthodoxe fervent, il a peint plusieurs fresques et tableaux dans des églises et monastères. Après 1917 et la Révolution, il a fait surtout des portraits. Le Christ, tête penchée et yeux fermés, repose en paix. Marie, vue de dos et portant un grand manteau blanc, est en pleurs. Jean, en rouge et blanc, est triste et songeur. Les deux sont liés. Dans ce drame émouvant, les figures sont de grandeur nature et proches. Deux anges se tiennent en haut à gauche. Sous les bras de Jésus, la lune et le soleil sont suggérés, et la ville de Jérusalem.
  1. JesusMafa, c.1973, Collectif pour la catéchèse, Cameroun. Dans cet ensemble de scènes évangéliques, le contexte est celui du peuple Mafa, au nord du Cameroun. Les illustrations finales ont été réalisées par l’artiste Bénédicte de la Roncière. Jésus, yeux fermés, est couronné d’épines mais non sanguinolent. Marie, en bleu, tête penchée et accompagnée d’une femme, tient la croix. Marie de Magdala est à genoux au pied de la croix. Jean, en blanc à gauche, tourne son regard vers Jésus. On voit les montagnes et les huttes, sous un ciel traversé de lumières.
  1. Sadao Watanabe, estampe, 1980, Brauer Museum of Art, Valparaiso University (Indiana), États-Unis. Cet artiste de Tokyo, baptisé à 17 ans, est réputé pour ses gravures de scènes des Évangiles, s’inspirant des techniques et de la tradition d’un art populaire japonais, le mingei. Cet art valorise la simplicité et l’accessibilité, ainsi que l’usage de matériaux naturels. Jésus, sur une croix rouge, avec un fond bleu, est paisiblement endormi, yeux fermés. Marie et Jean, agenouillés à ses pieds, sont recueillis en prière, méditant l’événement.
  1. Ambroise Gorelov & Jean-Baptiste Garrelou, fresque, 1996, Chapelle de la Dormition de la Mère de Dieu, Saint-Jean-en-Royans (Drôme), France. Les deux artistes, l’un moine et l’autre prêtre, font partie de l’atelier d’art orthodoxe Saint-Jean-Damascène. Cette chapelle de la Dormition relève de l’Église grecque orthodoxe. Nous avons ici comme une synthèse des éléments habituels dans l’icône de la crucifixion : Marie avec des femmes, montrant Jésus; Jean, tête accoudée, avec le centurion; la lune et le soleil, les anges, le crâne d’Adam, la ville de Jérusalem. Le filet de sang sort du côté de Jésus mais, par ailleurs, celui-ci ci a les yeux ouverts. Voici le roi de gloire.
  1. David Pastor Corbi, Stabat Mater, 2013, panneau latéral du retable de l’autel principal, Église Notre-Dame de l’Assomption, Guadalest (Province d’Alicante), Espagne. Ce peintre et illustrateur, né en 1971, est originaire de la ville d’Alicante, au sud-est de l’Espagne, sur la mer Méditerranée. Il a fait plusieurs œuvres pour des églises et il est lié aux Salésiens. Marie, à genoux, et Jean, debout, sont côte à côte. Jésus, yeux fermés et couronné, expose sa fragilité, plus que la puissance, par son corps. Les deux autres crucifiés sont évoqués par leur main. À droite, le centurion, et à gauche, le temple de Jérusalem, sous un ciel gris. Au pied de la croix, un livre ouvert …
  1. Icone ukrainienne Gutsul, 21e siècle, site etsy.com. Cette icone est écrite sur du verre, avec des couleurs vives. Elle provient du groupe ethnique Gutsul (ou Hutsul) de l’Ukraine, qui a ses traditions culturelles et se rattache à l’Église orthodoxe ukrainienne. Ces icônes domestiques sont présentes dans les maisons, mais on peut aussi les trouver dans des églises. Ici, Jésus est vivant et rayonnant. Marie et Jean, tous deux en rouge et bleu, sont recueillis. Le soleil souriant et la lune sont au rendez-vous. Les fleurs disent la joie pascale. Au pied même de la croix, voici comme une espérance…

Daniel Cadrin, o.p.


​​Dessin à tracer et à colorier

Ci-dessous un dessin simplifié à tracer et à colorier, librement inspiré d’une œuvre du « Maître de la Vie de Marie »

Cliquer sur l’image pour l’agrandir et la sauvegarder!

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