
Une nouvelle invitation à rencontrer Jésus, cette fois-ci au travers du regard que Jean Baptiste pose sur Jésus!
JEAN LE DÉRANGEANT : Luc 3, 10-22
Evangile de Jésus-Christ selon saint Luc – Chapitre 3
10 Les foules lui demandaient : « Que devons-nous donc faire ? »
11 Jean leur répondait : « Celui qui a deux vêtements, qu’il partage avec celui qui n’en a pas ; et celui qui a de quoi manger, qu’il fasse de même ! »
12 Des publicains (c’est-à-dire des collecteurs d’impôts) vinrent aussi pour être baptisés ; ils lui dirent : « Maître, que devons-nous faire ? »
13 Il leur répondit : « N’exigez rien de plus que ce qui vous est fixé. »
14 Des soldats lui demandèrent à leur tour : « Et nous, que devons-nous faire ? » Il leur répondit : « Ne faites violence à personne, n’accusez personne à tort ; et contentez-vous de votre solde. »
15 Or le peuple était en attente, et tous se demandaient en eux-mêmes si Jean n’était pas le Christ.
16 Jean s’adressa alors à tous : « Moi, je vous baptise avec de l’eau ; mais il vient, celui qui est plus fort que moi. Je ne suis pas digne de dénouer la courroie de ses sandales. Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu.
17 Il tient à la main la pelle à vanner pour nettoyer son aire à battre le blé, et il amassera le grain dans son grenier ; quant à la paille, il la brûlera au feu qui ne s’éteint pas. »
18 Par beaucoup d’autres exhortations encore, il annonçait au peuple la Bonne Nouvelle.
19 Hérode, qui était au pouvoir en Galilée, avait reçu des reproches de Jean au sujet d’Hérodiade, la femme de son frère, et au sujet de tous les méfaits qu’il avait commis.
20 À tout cela il ajouta encore ceci : il fit enfermer Jean dans une prison.
21 Comme tout le peuple se faisait baptiser et qu’après avoir été baptisé lui aussi, Jésus priait, le ciel s’ouvrit.
22 L’Esprit Saint, sous une apparence corporelle, comme une colombe, descendit sur Jésus, et il y eut une voix venant du ciel : « Toi, tu es mon Fils bien-aimé ; en toi, je trouve ma joie. »
Commentaire de l’Évangile
Par Daniel Cadrin, o.p.
Une voix se fait entendre. Elle nous parle de partage, de justice, de non-violence. C’est la voix d’un prophète radical et libre, qui vient réveiller et déranger. Jean le baptiseur, Jean le dérangeant, Jean à la parole qui parle vrai. Il vient aussi encourager, redonner courage, car il annonce quelqu’un à venir, quelqu’un à attendre comme la réalisation d’une promesse.
Des gens vont à lui avec des questions sur leur vie. Que faire? Comment vivre dans ce monde confus et agité? Il entend ces questions, les quêtes et souffrances qu’elles expriment. Ses réponses sont claires et honnêtes et elles vont à l’essentiel. En même temps, il fait plus que proposer des pistes pour vivre. Il annonce quelqu’un et il ne se prend pas pour cet autre qui ira plus loin que lui. Il prépare sa venue. Et la meilleure façon de se préparer à recevoir cette grande visite, c’est une pratique de partage, de justice, de non-violence. Ainsi, il ouvre un avenir à espérer.
Prophète radical, Jean critique vivement les puissances politiques et religieuses, mais il accueille à sa suite les gens de toutes classes et origines, qu’ils soient publicains, pharisiens, prostituées, étrangers. Jean s’attend à ce que le Messie qui doit venir agisse avec puissance et fracas. Le grand ménage s’en vient. Attention, ça va chauffer, comme un feu qui purifie. Le temps des mensonges et de la corruption arrive à sa fin. Aux gens qui désespéraient d’un changement, il annonce un revirement de situations. Plus tard (Lc 7,18-19), il sera surpris par l’approche de Jésus, différente de la sienne.
Jean baptise Jésus. Le baptême comme tel n’est pas raconté. Tout se passe après le baptême, en Luc de même qu’en Mt et Mc; en Jn, il n’y a pas de récit du baptême mais le témoignage de Jean Baptiste (Jn 1,32-34). Jésus, à ce moment-clé de sa vie, est en prière. Comme il le sera en Luc à tous les moments importants de sa vie, du choix des disciples à l’abandon au Père sur la croix, de la gloire sur la montagne de la transfiguration à l’épreuve au mont des Oliviers. Jésus est lié à son peuple, il n’est pas un spirituel concentré sur sa seule aventure personnelle. Il est baptisé par Jean, il entre avec son peuple dans ce mouvement de renouveau. Le ciel s’ouvre: cela signifie que la communication est rétablie entre la terre et le monde de Dieu. Et tout cela est approuvé par les plus hautes autorités, avec la présence de l’Esprit évoquée par une colombe et celle du Père suggérée par la voix, qui est celle des Écritures, citant Is 42,1 ou le Ps 2,7.
Jean a initié un mouvement religieux qui a marqué les origines de notre foi chrétienne. Jésus lui-même a été influencé par lui, par sa parole, par son baptême, par son appel à la conversion. Il a commencé sa vie publique comme disciple de ce Jean. Il suivra sa propre voie, unique, mais il reprendra plusieurs aspects du message et du style de Jean : l’annonce du Règne de Dieu, son ouverture à toute personne, son attention aux pécheurs et aux exclus, et sa liberté. Ainsi, Jésus lui-même va s’inscrire dans une lignée, pour aller plus loin encore.
La figure de ce Jean surgit aussi de notre propre mémoire, de notre histoire, car il est patron des Canadiens-français et sa fête est même devenue fête nationale. Mais ce Jean des évangiles n’est pas un enfant frisé et gentil, un doux berger. Sa peau est rude, marquée par les vents et le souffle du désert. Il est un adulte, prophète, audacieux et libre. Courageux devant les pouvoirs, il ne cèdera pas face aux conformismes et il en paiera le prix de sa vie, comme celui-là même qu’il annonçait. Homme de parole, homme de la Parole, il est l’une des figures les plus fortes de la Bible, tant dans ses grandeurs que dans ses faiblesses. Peut-être sa vigueur effraie-telle nos spiritualités toutes intérieures et confortables ou risque-t-elle de mettre en désordre nos petits mondes bien ordonnés, où tout doit être tranquille et harmonieux ?
Voici une figure dérangeante, réveillante, qui vient nous sortir de nos habitudes et de notre indifférence. Et si nous laissions sa voix, qui vient de nos origines et du plus profond de nous, nous toucher quelque part, là où notre cœur est froid et notre tête confuse, là où nous sommes engourdis. Nous qui aujourd’hui nous inscrivons dans cette longue lignée, comme croyants, et aussi comme citoyens d’une culture dont le patrimoine n’est pas seulement ou d’abord fait de pierres et de documents, mais de convictions sur la dignité de la vie humaine, d’une ouverture face à plus grand que nous et d’une attente face à l’avenir. Nous pouvons nous demander : En quoi l’appel de Jean le Baptiste me dérange-t-il ? À quel changement m’invite-t-il? Et en quelles voix aujourd’hui sa voix se fait-elle entendre?
Images de Jean Baptiste
Dans les arts visuels, on trouve plusieurs figures de Jean le Baptiste : prêchant aux foules et parfois leur pointant du doigt Jésus qui vient; baptisant des gens, souvent dénudés, prêts à entrer dans l’eau ou en sortant; baptisant Jésus, seul avec lui ou entouré. D’autres œuvres montrent seulement Jean Baptiste, comme figure importante, surtout en sculpture et vitrail. Son style d’habit indique qu’il est un homme du désert, dépouillé, un prophète.
Dans le récit du baptême, avec Jean et Jésus, deux autres figures sont présentes : l’Esprit, symbolisé par une colombe, ce qui est plus simple à montrer; le Père, par la voix des cieux (celle des Écritures) mais sans visage; il est rarement évoqué.
Les lieux rattachés à Jean sont le désert et le fleuve Jourdain. Plusieurs artistes ont mis en scène des foules, avec des personnages illustrant la diversité des gens qu’il attirait, dans des paysages qui varient, du rocailleux au bucolique.
Dans ses attributs, objets ou signes qui indiquent sa vie et son identité, on trouve le bâton, celui du pèlerin, du marcheur, et souvent l’agneau à ses pieds. Jean a dit : Voici l’agneau de Dieu (Jn 1,29) en désignant Jésus. Cet agneau signale son rôle de précurseur, d’annonceur du Messie. Mais cet agneau a donné naissance à des quiproquos ou du moins des confusions, faisant de Jean un berger!
Dans l’iconographie de Jean Baptiste, d’autres scènes sont aussi présentes : Jean enfant avec son cousin Jésus; sa mort tragique (il est décapité); au pied de la croix avec Marie, les deux figures qui font le lien entre l’ancienne et la nouvelle alliance. Mais elles ne sont pas incluses ici.
Voici quelques œuvres montrant certains des aspects soulignés.

- Mosaïque, fin du 5e siècle, coupole, Baptistère des Aryens, Ravenne, Italie. La figure de Jésus est celle d’un jeune homme imberbe, fréquente dans l’Antiquité. Sa nudité est une affirmation théologique, celle de l’humanité de Jésus. Jean pose la main sur sa tête; l’Esprit, la colombe, verse de son bec une huile d’onction. L’homme âgé à gauche, qui verse l’eau depuis une outre, personnifie le fleuve Jourdain; c’est une figuration courante dans la culture antique et intégrée ici. La voix du ciel n’est pas évoquée. La scène est entourée du cercle des apôtres, chacun avec la couronne de gloire.
- Herrade de Landsberg, miniature, c.1167-1185, Hortis Deliciarum, Strasbourg, France. Cet ouvrage (Jardin des Délices) est la première encyclopédie réalisée par une femme, l’Abbesse Herrade de l’Abbaye Mont St-Odile en Alsace. Elle a aussi fait les miniatures. Aux éléments semblables à l’œuvre précédente, s’ajoutent des anges en service, une colonne avec la croix et le Père évoqué en haut par les mains du demi-cercle. Le fleuve Jourdain est présent mais en plus petit, dans l’eau. Jésus est vraiment plongé dans l’eau, jusqu’au cou!
- Andrea Pisano, bronze, 1330, porte-sud, Baptistère de Florence, Italie. Cette porte du baptistère dédié à Jean Baptiste, patron de Florence, comprend dix scènes de sa vie. Au baptême, on retrouve des éléments des œuvres de l’Antiquité. Jésus est un adulte barbu, autre figure présente aussi aux 5e-6e siècles. Un ange à gauche est en service.

- Paolo Veronese, c.1562, Galerie Borghese, Rome; c.1583, Palais Pitti, Florence, Italie. Dans l’œuvre à gauche, le maître vénitien montre Jean prêchant à des gens et indiquant Jésus qui vient. Il porte un étendard sur lequel est écrit Ecce (Voici). Des femmes sont présentes; près de l’épaule de celle agenouillée, un enfant nous regarde. Dans l’œuvre à droite, Jésus agenouillé et costaud reçoit le baptême; avec des anges en service, une femme qui regarde Jean, une colombe rayonnante. Dans les deux œuvres, les vêtements sont élaborés et les scènes encadrées par des arbres.

- Alexander Ivanov,1837-1857, Galerie Tretyakov, Moscou, Russie. Ivanov a peint plusieurs scènes bibliques; celle-ci est son œuvre majeure, longtemps travaillée : L’apparition du Christ au peuple. On y voit des gens d’âge et de condition diverses venir à Jean, incluant soldats et pharisiens; et certains se font baptiser. À la gauche de Jean Baptiste, qui tient une croix, trois futurs apôtres (Jean, André, Nathanaël). Jean montre le Christ qui s’approche, dans un vaste paysage qui le fait ressortir

- James Tissot, c,1886-1894, Brooklyn Museum, États-Unis. L’œuvre à gauche montre Jean prêchant dans un décor désertique et indiquant à la foule Jésus qui vient. Tissot, un artiste français qui a vécu en Terre sainte, est attentif aux paysages et au contexte. À droite, dans le baptême au Jourdain, Jean est vu de dos : l’accent est ainsi mis sur Jésus, la figure centrale. Ces approches expriment picturalement la position et la parole de Jean.
- Statuette, carton, 19ème siècle, Musée national des Beaux-Arts du Québec, Québec, Canada. Voici une figure qui fut présente depuis la fin du 19ème siècle dans les processions de la St-Jean-Baptiste au Canada-français le 24 juin. Un enfant mignon, avec un agneau, comme s’il était un petit berger. Le contraste est grand avec l’œuvre qui suit.

- Pablo Gargallo, bronze, 1933, jardin du Baltimore Museum of Art, États-Unis. Ce sculpteur catalan, marqué par le cubisme, fut un innovateur influent. Cette œuvre, sa dernière avant sa mort, s’intitule : Le Prophète. Elle exprime avec force la passion et la radicalité de Jean, bouche ouverte, qui appelle au changement et annonce le jugement.

- Jeanne Vanasse, polyptique, 1996, Cathédrale St-Jean-Baptiste de Nicolet, Canada. Cette religieuse des Sœurs de l’Assomption, pionnière en arts visuels et maintenant centenaire, a présenté ainsi son œuvre : « Comme le Mystère Pascal, le Baptême est centré sur la croix et la résurrection où Jésus apparaît comme Ressuscité, habillé d’eau et de lumière … L’humanité se remet en marche vers le fleuve aux purifiantes eaux au-dessus desquelles plane l’Esprit-Saint. »

- John Nava, tapisseries, 2002, Cathédrale de Los Angeles, États-Unis. Ces cinq tapisseries de 14 mètres de hauteur, d’un artiste californien, sont au-dessus du font baptismal de cette nouvelle cathédrale, la plus grande des États-Unis. Au centre de cette œuvre impressionnante, à la fois simple et spectaculaire, Jean et Jésus, et l’eau. Et vers le haut, des formes circulaires, évoquant le mystère d’une Présence …
Daniel Cadrin, o.p.
Dessin à tracer et à colorier

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